Les petits discours de l’orateur
La tradition s’est implantée depuis l’an dernier de donner au public un petit discours sous forme de conte avant les spectacles !
Discours 2025
L’histoire se passe dans un pays, c’est le pays des phrases.
Dans ce pays, il y a des phrases très courtes et des phrases très longues.
Par exemple, la phrase « je t’aime », elle circule doucement comme un parfum de fleur qui s’enrubane d’une oreille à l’autre.
Ou la phrase « Veux-tu me donner la main ? » : elle garde toujours avec elle un point d’interrogation pour se protéger au cas où elle rencontre la phrase qui dit « non ».
Mais la phrase qui dit « non », il faut le dire quand même… elle est vraiment très courte, certes… et elle peut paraître méchante… mais elle peut être votre amie parfois aussi : la phrase qui dit « non », il faut toujours l’avoir dans son sac.
Cependant, il y a des moments où elle ne devrait pas être là, la phrase qui dit « non ». Par exemple, lorsqu’un arc-en-ciel apparaît, que les enfants sont tous là, que les artistes sont prêts et que tous les bénévoles disent à monsieur cécé-hache-baie : « Peux-tu nous donner la main ? »… là, c’est bien dommage qu’elle arrive, la phrase qui dit « non ».
Et puis, il y a des phrases longues aussi qui aident à avancer dans ces moments-là, comme :
« jamais les crépuscules ne vaincront les aurores, étonnons-nous des soirs et vivons les matins » (1).
Oh, elle est longue, cette phrase…
Et maintenant, place à la petite phrase qui ouvre à la magie. Vous la connaissez, elle dit « chuuuut ».
Il y avait un monstre, il s’appelait Spot (2). Au début il était très gentil, dès que tu avais peur du noir, il t’éclairait, c’était bien.
Mais le problème, c’est que petit à petit, il a oublié que le noir, même s’il fait peur, il faut le laisser prendre sa place la nuit, sinon on ne peut pas dormir. Or, si on ne dort pas, on ne rêve pas.
Alors Spot, il éclairait, il éclairait, mais il ne s’arrêtait plus.
Et quand on voulait fermer les yeux à l’ombre d’un sous-bois, un après-midi ou devant la plage au crépuscule, Spot, il arrivait et te mettait plein de lumière dans les yeux.
Par exemple, quand tu rêvais que la belle Terre bleue est en train de tourner dans l’univers, il t’aveuglait en criant « France info, France info », le genre de truc qui ne veut absolument rien dire.
Ou bien si tu voulais contempler le long mouvement des astres autour de l’étoile polaire, il t’aveuglait en criant « Notif Insta, Notif Insta », ce qui veut non plus rien dire.
Alors tous les gens qui aimaient la douceur des forêts et le silence du crépuscule se sont réunis pour trouver une solution.
Ils ont poussé Spot pour qu’il éclaire très loin, là-bas, du côté de la Terre où il fait toujours jour,
et qu’il nous laisse un peu de clair obscur pour rêver.
Mais Spot, il ne voulait pas éclairer dans le vide, alors il fallait le pousser très fort.
Du coup, on a demandé de l’aide à deux grands gaillards.
Le premier, c’est cécé-hache-baie, il n’avait juste pas envie.
Et le second, ministère, il aidait du bout des doigts, mais il disait que quand même rêver c’est pas bien.
Alors tous ensemble, même sans ces gaillards, ils ont quand même réussi.
C’est grâce à eux qu’on peut rêver dans cette salle en clair obscur et regarder le beau spectacle qui vient.
Mais attention, quand vous sortirez, faites bien attention à Spot…
« Elle était toute petite, elle s’appelait Cœur. Il était minuscule, il s’appelait Culture.
Ils étaient fatigués d’avoir autant marché, d’avoir affronté plein de petits gnomes enragés
qui les agressaient en disant « regarde-moi, regarde-moi ».
Ils étaient fatigués, la petite qui s’appelait Cœur et le petit qui s’appelait Culture.
Fatigués d’avoir traversé ces pays plein de petits gnomes qui disaient « regarde-moi, regarde-moi ».
Les gnomes du pays des actualités, les gnomes du pays du budget, les gnomes du pays de l’austérité.
Alors la petite qui s’appelait Cœur et le petit qui s’appelait Culture, ils voulaient juste se reposer et fermer les yeux et puis rêver.
Ils se sont mis sous le croissant de lune qui s’appelait cécé-hache-baie mais celui-ci s’est éclipsé.
Ils se sont mis sous les étoiles qui s’appelaient municipalités mais en dehors de quelques astres fidèles, celles-ci ont fondu dans le ciel.
Il restait alors la grande voie lactée pour espérer un peu mais elle a été dissolue au mois de juin dernier
et maintenant elle ne fait que bouger dans tous les sens.
Finalement la petite qui s’appelait Cœur et le petit qui s’appelait Culture sont venus là où il y avait des enfants, là où il y avait des bénévoles, là où il y avait des artistes.
Ils sont venus pour rêver et ils sont là quelque part dans cette salle, toujours vaillants. Bon spectacle !
C’est l’histoire d’une petite Main, elle tissait des rubans pour les enfants, elle cherchait des couleurs pour ses rubans.
C’est l’histoire d’un petit Lutin, il avait dans sa chapeau plein de couleurs pour les enfants mais pas de rubans.
petit Lutin et petite Main se sont rencontrés à Paris sous la Tour Eiffel.
Ensemble ils sont venus ici il y a 29 ans monter un immense feu d’artifice de rubans plein de couleurs.
Des rubans bleus comme le ciel sans nuages, des rubans jaunes comme le soleil du matin,
des rubans rouges et oranges comme les fleurs du printemps, des rubans ocres et bruns comme les autonnes que nous traversons tous.
petite Main et petit Lutin vivaient à une époque où fées & magiciens semblaient pouvoir conquérir le monde, une époque où les choses étaient simples.
Mais la neige est tombée, mais la neige a fondu et le monde est devenu un peu gris, gris et plus difficile.
Fées & magiciens ont disparu dans un monde où la poésie n’est plus accueillie.
Jusqu’à récemment lorsqu’un maire tout gris a déclaré, avec monsieur cécé-hache-baie, que la magie désormais c’est chacun pour soi, on ne partage plus.
Et malgré tout, ce qu’ont créé petit Lutin et petite Main est toujours là et continue à rassembler les enfants comme autour d’un feu avec ses immenses rubans colorés.
Vous en connaissez-vous des rubans colorés qui dansent depuis 29 ans?
Vous pourrez même venir nous soutenir l’an prochain pour nos 30 ans, car la magie est toujours vivante.
Ce petit texte est un clin d’œil à nos amis Max et Marie-Jo, fondateurs historiques du Festival des Maynats.
C’était un lapin, il adorait écrire des formules de mathématiques sur le tableau avec ses créés.
Il venait quand l’école était fermée, profiter du tableau sans que personne ne le voie.
Un jour il se réveilla et tout avait disparu, l’école et le tableau. Tout, ah non,
l’écrit était toujours là. Alors, dépité, il dessina un grand cercle sur le sol,
mais vraiment un très très grand cercle. Des gens le virent et disaient « mais qu’est-ce
que c’est que ce lapin qui trace un cercle sur le sol avec ses craies? » Or, ce lapin,
il n’aimait pas du tout qu’on le regarde. Et du coup, dans son cercle, il avait certes envie d’écrire
des formules, mais il n’osait pas : parce qu’on le regardait. Timidement, il écrivit quand
même :
« distance = vitesse x temps »
mais la formule s’effaça et, comme par magie, à la place apparu un vers de poésie :
« Mais où sont les neiges d’antan ? »
Il réessaya avec un « galimatias de phrases scientifiques :
« Formule infinie,
équation d’algèbre,
longueur du contour,
calcul de fréquence. »
et cela s’effaça, à la place, il y avait :
« ce qu’il faut de nuit
au-dessus des arbres,
ce qu’il faut d’amour
au fond du silence. » (3)
Ça alors, chaque formule se transformait en poésie !
Il essaya encore avec :
« et un demi, un tiers, un quart
et un demi, un tiers, un quart »
il apparut :
« une fourmi traînant un char
plein de pingouins et de canards » (4)
Et voilà : maintenant, quand les gens avaient envie de magie, ils demandaient au lapin de tracer un cercle et
d’écrire des formules de maths pour voir en émaner la poésie.
C’est cela que font vos bénévoles des Maynats : ils tracent un grand cercle sur le sol poussiéreux de Pouzac et font des calculs très
compliqués de budget, d’horaire, de jauge, bref de plein de chiffres qui, au final, se transforment et laissent la place à la poésie. Vous ne le saviez pas, les bénévoles des Maynard sont des petits lapins blancs magiciens !
C’était un type qui vivait avec une plume sur sa tête. Il se baladait comme ça, il
disait « je veux marcher dans la beauté ». Mais ça n’était pas le chat botté, ah non,
il n’avait pas d’épée. Pour fendre l’air, il utilisait des poèmes qu’il tirait de
ses plumes. Par exemple, il disait :
« la feuille verte enveloppe la goutte de pluie dont elle fait et défait la vie » (5).
Et il marchait, ce type, inlassablement, même quand il pleuvait, même quand il neigeait, même quand
il faisait chaud et toujours il fendait l’air avec ses poèmes. Il rencontra d’autres
poètes comme lui et les gens autour disaient, en les regardant passer, « regardez ces drôles
de types qui vivent de leurs plumes » (6). Ils montèrent un grand festival appelé Maynats.
Monsieur cécé-hache-baie leur dit « on ne veut plus de vous, vous allez rester tous déplumés ». Cependant,
ils continuent, tous ces poètes avec leurs plumes, inlassablement : et on ne les arrêtera pas.
(1) Appolinaire, cité par Maurice Rebeix dans l’Esprit ensauvagé
(2) l’idée générale est inspirée par la lecture de Tanizaki, Éloge de l’ombre.
(3) Jules Supervielle, Vivre encore, dans : Les amis inconnus
(4) Robert Desnos, la fourmi
(5) Haïku de l’auteur japonais Kikakou
(6) Léo Ferré, les poètes
Discours 2024
Dans les jeux olympiques il y a au moins deux choses admirables : a) porter la flamme, symbole de la persévérance à porter un tel évènement d’année en année, b) le marathon qui nous enseigne à ne pas nous essouffler quoi qu’il arrive
Le festival des Maynats porte sa flamme et ne s’essouffle pas depuis 28 ans malgré les embûches comme cette année le refus de la CCHB à poursuivre ses subventions
Ici aussi donc vous pouvez vivre l’esprit olympique dans notre assiduité à tenir bon au profit de la culture vivante et au profit des enfants
Bienvenue, olympiquement, au 28e festival des Maynats, avec le spectacle… de la compagnie…
Dans les mathématiques il y a une chose pénible et une chose merveilleuse. La chose pénible c’est que tout tombe toujours juste en maths ; il n’y a pas d’erreurs de calcul, contrairement par exemple aux horaires du spectacle vivant qui, lorsque les retards s’entrechoquent, vous font, comme à l’instant, patienter 20 minutes dehors ! La chose merveilleuse maintenant en maths, c’est résoudre les équations : trouver l’inconnue x, celle qui permet de poursuivre le problème.
Tenir un festival comme celui-ci depuis 28 ans, c’est résoudre une équation avec de nombreuses inconnues sans cesse renouvelées, comme cette année la fin de subvention de la CCHB
Alors bienvenue mathématiquement au 28e festival des Maynats avec le spectacle… de la compagnie…
L’arbre qui, sorti d’une goutte obscurément
S’élance, et qui de l’ait, en fait son aliment
Cet arbre voyageur qui marche à pas tranquilles
Ce pèlerin, ce point que l’on croit immobile
Le festival des Maynats est comme cet arbre de Victor Hugo :
Ses fruits : nos artistes et leur spectacle
ses sels minéraux : les subventions soumise au gré des vents…
sa terre : les bénévoles, car la terre fait le travail mais on ne lui prête pas attention
son ensoleillement : vous, public, vous les enfants
Bienvenue, végétalement, au 28e festival des Maynats avec le spectacle… de la compagnie…
Un vieux parent de ma famille a un jour fait la longue route pour venir nous voir. Avant son arrivée, nous nous creusions la tête : que va-t-on lui proposer ; on pourrait y aller ici, on pourrait aller là, on pourrait faire ceci, on pourrait faire cela.
Il arrive, on s’installe autour de la table. On lui demande ce qu’il veut faire pendant son séjour. Avec ses yeux pétillants, il dit : « j’ai une idée… Et si on restait ensemble »
C’est cela aussi le festival des Maynats : être ensemble. Dans un monde où tout nous sépare : les écrans nous séparent, les opinions nous séparent. Alors ici soyons simplement ensemble, comme des enfants…
Bienvenue, donc, merveilleusement, au 28e festival des Maynats, avec le spectacle… de la compagnie…
C’est l’histoire d’un tout petit coquillage au fond de l’eau. Il a un peu peur car il est minuscule. Il commence à se faire des amis, il fabrique alors des perles pour les offrir autour de lui.
Chaque année il grandit ; les poissons l’aident se nourrir et à prospérer, merci à eux : mairie de Pouzac notamment mais aussi de Campan Montgaillard et Gerde, au département et à la région et aussi les clubs de foot et de tennis de table de Pouzac (et merci quand même à Bagnères pour les bâches…)
Au bout de 28 ans il grandit tellement qu’il fait peur à des gros poisson, comme le poisson CCHB qui ne veut plus le subventionner
Aujourd’hui, ce coquillage, appelé Maynats s’ouvre plusieurs fois par an : on rentre tous à l’intérieur de lui et il nous offre ses perles venues du bout du monde comme ce spectacle… de la compagnie…
C’est l’histoire d’une petite bulle
Elle est née comme ça un jour
Elle avait une idée
Faire un truc pour les enfants…
Cette petite bulle a rencontré une deuxième bulle, puis une troisième bulle, une ribambelle de belles bulles qui tintinnabulent
Depuis 28 ans toutes ces bulles se réunissent chaque année pour un florilège de spectacles, et au bout de 28 années toutes ces bulles travaillent en partenariat avec Pouzac bien sûr, mais aussi Campan, Montgaillard, Gerde, le département et la région et aussi les clubs de foot et de tennis de table de Pouzac
Mais ses bulles ne peuvent pas travailler avec la CCHB, qui doit avoir peur des bulles…
La bulle d’aujourd’hui nous vient de la compagnie… avec le spectacle…
C’est l’histoire d’un petit grain de sable, il s’ennuyait, alors il s’est associé avec d’autres grains de sable pour baliser un chemin dans l’inconnu de la forêt
Dans le monde de l’art où la règle est : créer
[] Le monde du spectacle où il faut inventer
tellement de grains de sable que la mer est venue pour nous prendre en voyage
Sur les grandes vagues des artistes
Pour les embruns de ces spectacles nous remercions Pouzac bien sûr, mais aussi Campan, Montgaillard, Gerde, le département et la région et aussi les clubs de foot et de tennis de table de Pouzac
Nous ne pouvons malhreusement pas remercier la CCHB, pour qui nous représentons peut-être un grain de sable dans on engrenage…
Sur notre petite barque, accueillons maintenant le spectacle… de la compagnie……
et ce soir vous rêverez peut-être, les enfants à tout ce que vous avez vu aujourd’hui car ne dit-on pas que le marchand de sable, chaque soir, pose tous les petits grains au ciel pour former, le temps d’une nuit, la délicate phosphorescence de la Voie Lactée
Discours signés Vincent Douce